Le Mexique risque fort de surprendre le voyageur qui aurait négligé quelques notions préalables d’Histoire‑: un bouillonnement continu où légendes et tragédies s’entremêlent pour construire la réalité d’aujourd’hui.
Mexique : les origines
Les premières traces de culture découvertes dans le sud remontent à plus de 2.500 ans avant JC. De nombreuses civilisations vécurent dans l’aire géographique du Mexique actuel, dont l’une dites plus célèbres, la civilisation maya, atteignit son apogée au quatrième siècle de notre ère. On doit à ces premières civilisations la découverte du maïs, du cacao, des haricots rouges et du coton. A l’arrivée d’Hernán Cortés en 1519, une autre, la civilisation aztèque, domine la région grâce à sa puissance guerrière. La capitale Tenochtitlán compte 300.000 habitants. L’empire aztèque s’étend sur un large territoire, composé de nombreuses tribus.
En débarquant avec ses hommes à Veracruz, Cortés tire partie des dissensions existantes et notamment du besoin de revanche des Tlaxcaltèques et en fait ses alliés. La conquête sera rapide. Les chevaux, la Malinche (une femme indigène), sont d’une aide précieuse.
La mythologie elle-même joue en faveur des Espagnols : à la vue de Cortés, l’empereur Moctezuma II crût que Quetzalcoatl, le dieu Serpent à plumes, était de retour, ce qui signifiait la fin de l’empire. Animés par l’appât du gain, sans parler du zèle pour la «‑Sainte Croix‑», Cortés et ses six cents hommes parviennent à s’emparer de ce riche territoire en très peu de temps.
La Nouvelle Espagne
A mesure que le pouvoir de Cortés –‑et donc de l’Espagne‑– s’étend, les civilisations mésoaméricaines se démantèlent. L’ignorance, l’indifférence des Blancs à l’égard des cultures qu’ils découvrent fut pour beaucoup dans ce naufrage. N’avaient-ils pas besoin d’esclaves pour cultiver la terre, pour creuser des mines, etc. ? Quelques voix s’élèvent, parmi lesquelles celle du moine Bernardino de Sahagún, qui ose crier au monarque que les Indigènes sont des êtres humains et non des esclaves. Bientôt, sur les territoires occupés par les Espagnols s’élèvent des demeures féodales et des églises. L’architecture de l’époque coloniale se reconnaît au mariage des styles européen et indigène.
La religion joue un rôle de premier plan. Le catholicisme fut apparemment accepté, mais généralement mal compris. Aujourd’hui encore, il s’affirme comme un mélange de croyances, de rites chrétiens et païens.
Les frères franciscains sont les premiers religieux à s’installer en Nouvelle Espagne. Réduisant les chefs locaux à des subalternes, ils construisent des écoles, des couvents, des églises, des ateliers. Même si les populations indigènes ont été mises à l’écart, (presque) tout ce qui fut réalisé dans le domaine de l’éducation, l’a été par des religieux. Sans des érudits tels que Bernardino de Sahagún, qui se donna la peine d’apprendre plusieurs dialectes indigènes, ou encore Bartolomé de las Casas, le peu que nous savons de l’histoire du Mexique précolombien aurait été perdu pour toujours. Sur le plan économique, la colonisation concentre ses efforts sur l’exploitation des mines et sur l’élevage, toutes les exportations allant à l’Espagne.
La guerre d’Indépendance
La présence des gouverneurs – ou vicerois– à México confirme la prépondérance de l’ancienne capitale et ne fait que rejeter dans l’ombre les capitales provinciales. La Nouvelle Espagne connaît alors des siècles de relative tranquillité. A la fin du XVIIIe siècle, les métis, toujours plus nombreux, se soulèvent contre le statut social jadis imposé par les conquérants. Les temps sont venus, pour la Nouvelle Espagne, de céder la place au Mexique.
Le 16 septembre 1810 a lieu un soulèvement indépendantiste, sous l’impulsion d’un prêtre, le père Miguel Hidalgo, initiateur de l’indépendance du pays. Si les
Espagnols se soucient peu du sort des indigènes, le père Hidalgo, influencé par l’encyclopédisme français, nourrit des idées avancées. Un autre personnage joue un rôle important, José María Morelos. En 1821, l’indépendance est signée par Juan O’Donojú, dernier vice-roi de Nouvelle-Espagne. Agustín de Iturbide se fait nommer empereur en 1822, mais il est déposé en1823 par l’armée du général Santa Anna. En 1824, le Mexique adopte une nouvelle constitution et la république est proclamée. Le premier président mexicain est Guadalupe Victoria. Jusqu’au milieu du XIXe‑siècle, le pouvoir présidentiel changera près de quarante fois de mains, dont onze en faveur de Santa Anna. Ce dernier est aussi célèbre pour avoir cédé une grande partie du Mexique aux Etats-Unis. En effet, les velléités d’indépendance du Texas conduisent quelques années plus tard à une guerre entre les Etats-Unis et le Mexique, qui aboutit en 1848 à la cession par le Mexique du Texas, de l’Utah, du Colorado, de la Californie, de l’Arizona et du Nouveau-Mexique. A la fin des années 1850, émerge la silhouette austère de Benito Juárez. La guerre de Réforme sévit jusqu’en 1861, quand Juárez accède au pouvoir. Sa décision de suspendre pour un temps le service de la dette extérieure provoque l’intervention des pays créanciers (l’Angleterre, l’Espagne et la France). Leurs troupes débarquent à Veracruz entre décembre 1861 et janvier
1862. Une convention est signée, mais Napoléon‑III refuse de ratifier l’arrangement et déclare la guerre au Mexique, usant d’un prétexte, le remboursement de la créance, plutôt douteuse, du banquier Jecker. L’une des premières grandes batailles entre Français et Mexicains voit la victoire des derniers le 5‑mai 1862 à Puebla. En 1864, sous le contrôle des troupes françaises, une assemblée de fantoches, réunie à México, offre la couronne
à l’archiduc Maximilien d’Autriche. En 1867, Napoléon III décide de rapatrier ses troupes. Maximilien capitule en mai et est fusillé le 19 juin. Benito Juárez, héros national surnommé le «‑Benemérito‑de las Americas‑», est à l’origine du mouvement de réforme (la Reforma) qui exproprie les biens du clergé, place l’enseignement sous le contrôle de l’État, proclame la liberté religieuse, reconnaît le mariage civil et, d’une façon générale, réalise la séparation de l’Eglise et de l’État. Les classes défavorisées peuvent enfin accéder aux postes importants, tandis qu’un véritable programme d’égalité sociale est mis sur pied.
La révolution de 1910
L’autre grande figure de l’époque est Porfirio Díaz. Officier, il a combattu les Français, avant de devenir général, puis président du Mexique. Dictateur, il dirige le pays pendant trente-quatre ans, avec une interruption de quatre années. Díaz suspend les lois anticléricales, s’allie avec des financiers, des capitalistes étrangers, favorise les « hacendados », enrichit le clergé. Il instaure ce qu’on appelle le porfiriato, qui se caractérise par une dictature légitimée par la loi. Néanmoins, le pays entre dans le XXe‑siècle avec des chemins de fer, des mines, une agriculture intensive et des puits de pétrole d’où jaillit l’or noir.
Mais Porfirio Díaz fait la part trop belle aux investissements étrangers et les signes de mécontentement se multiplient. La violence qui couvait se manifeste bientôt à travers les initiatives du mouvement Terre et Liberté.
En novembre 1910, l’agitation reprend. Le général Carranza au nord-est, Francisco « Pancho‑» Villa au nord-ouest, enfin Emiliano Zapata dans le sud, luttent avec leurs moyens et à leur façon pour une vie meilleure. Pendant plus de dix ans, le Mexique est entraîné dans un tel maelström militaire et politique qu’il est très difficile de s’y reconnaître, et pratiquement impossible de distinguer les acteurs du drame révolutionnaire.
Mais tout le monde connaît le nom de Pancho Villa, cavalier infatigable, et le non moins légendaire Emiliano Zapata, métis de l’État semi-tropical de Morelos, un petit paysan qui se révéla grand stratège.
La réforme agraire
En 1917, une nouvelle constitution avec un fort contenu social est adoptée. Même si elle a été modifiée à plusieurs reprises, elle est toujours en vigueur aujourd’hui. De nombreux présidents se sont succédés à la tête du pays, parmi lesquels Lazaro Cardenas, qui a engagé un vaste programme de réforme agraire. En 1940, à la fin de son mandat, un million et demi de familles bénéficieront ainsi de la distribution des terres. Il a aussi nationalisé l’industrie pétrolière en 1938.
L’expérience coopérative des ejidos est lancée sur une grande échelle dans le district septentrional de Laguna, pour stimuler la culture du coton. Le pays connut ensuite une ère de relative stabilité. Les défis que le Mexique, présidé depuis 2012 par Enrique Peña Nieto, doit relever aujourd’hui sont des changements économiques majeurs, sociaux, politiques (processus de démocratisation).
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